Chante la Louve !

Dans la lueur frémissante de l'Aurore, elle est sortie de sa maison sous la terre, ses pieds nus frôlent les feuilles mortes et puis l'herbe du chemin encore humide de rosée.

Elle n'est pas plus grande que trois pouces, mais, elle a la clarté d'une étoile que l'on pourrait voir en plein jour.

Elle s'en va sur la colline aux ajoncs qui fleurent bon en leur floraison de janvier.

Elle a rendez-vous avec le Levant. Mais elle prend son temps, s'arrête pour contempler la mousse et les lichens.

Là, justement devant son pied léger, est une floraison de différentes cladonias qu'elle admire au passage.

Comme la Nature est belle, se dit-elle, et quelle chance est la mienne de vivre en ce pays de Brocéliande où il demeure des espaces comme celui-ci !

Un peu plus loin, c'est un magnifique sedum dont les tiges rouges attirent son regard. Il est étalé sous le rayons du Soleil qui s'est levé doucement à l'horizon. Et l'un de ses petits protégés s'y développe.

Elle se penche sur lui et lui chante doucement cette douce mélodie :

« Mon Enfant, mon Enfant, dresse-toi fièrement !

Ose montrer ta beauté et ta force !

Aujourd'hui tu es vivant, demain ? On ne sait !

Alors, mon Enfant élèves-toi au plus haut de tes possibles ! »

C'est la chanson qu'elle chante à tous ses petits !

Car c'est elle, voyez-vous, qui, sur la colline aux ajoncs est chargée de faire pousser les minuscules champignons, compagnons des mousses, des lichens et des plantes minuscules.

Ce matin elle vient vérifier que tout va bien, que ceux qu'elles a aidé à grandir ont bien atteint leur taille maximale. Ils ne vivront que quelques jours, mais ces jours-là, elle viendra les voir et leur chantera sa chanson de Fée des champignons. Comme tous les enfants de toutes les espèces, il faut les encourager à se développer !

Et, parallèlement, elle fera jaillir de terre d'autres spécimens sur lesquels elle veillera également avec une bienveillance sans faille.

L'hiver est là, mais toute une vie s'active sur le sol, car la Nature ne s'arrête jamais de donner vie. Et dans l'air qui l'entoure, elle peut sentir les odeurs des lichens, des ajoncs, des mousses, de la terre, des champignons... Un délice ! Une telle richesse pour l'odorat qu'elle pourrait en défaillir !

Tout à coup, elle se souvient d'une amie bien plus âgée qu'elle, elle doit bien avoir trois-cent-cinquante-huit ans, qui ne va pas très bien, elle ne sort pour ainsi dire plus de chez elle et ne fréquente plus que les taupes et les vers de terre. Mais comme elle est assez grognon depuis qu'elle est affaiblie, ne pouvant remplir de missions, la Fée des champignons, ne va pas la voir. Mais elle a une idée !

Elle cueille au passage une fleur d'ajonc et s'en va la déposer à l'entrée du terrier abandonné où habite l'ancienne.

Elle se ravise et se dit qu'une seule, ce n'est pas assez, alors elles retourne sur la colline et en cueille toute une brassée ! L'odeur lui monte à la tête et la remplit d'une félicité dont elle se dit qu'elle sera forcément active pour la Fée malade.

Avant de rentrer, elle descend auprès du ruisseau qui gronde en dévalant la pente. L'eau, de cascades en cascades, court vers son destin, sans hésiter.

Loin très loin de là, elle se jettera dans l'Océan après bien des kilomètres d'aventures et puis l'évaporation aidant, elle reviendra peut-être sous la forme de gouttes de pluie dans ce ruisseau et tout recommencera !

Elle s'assied sur une pierre moussue, et entre en contemplation, en communion avec cette énergie bouillonnante si différente de celle de là-haut. Mais au fond la vie est comme cela, toujours renouvelée.

Le char du Soleil est descendu de l'autre côté du Monde et seules des lueurs orangées lui parviennent encore, alors elle rentre en sa demeure, bien au chaud sous la terre, heureuse.

15/01/2017

Colette-Sidhana

comme toujours sauf si photos de divinités, les photos sont aussi les miennes.